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La cave aux coquillages : une mise en valeur remarquable
du
Patrimoine géologique
du
Lutétien moyen de Fleury-la-Rivière
(troisième partie)
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Éléments taphonomiques et paléoécologiques :
Les conditions environnementales très changeantes dans le milieu marin au Lutétien moyen n’ont pas empêché l’établissement et la grande diversification des organismes, en particulier en ce qui concerne les mollusques. De façon générale le Lutétien représente une période favorable au développement de la vie sous-marine : les nombreuses études portant sur cette formation ont permis de recenser plus de 3000 espèces différentes d’organismes marins parmi lesquels de très nombreux mollusques (près de 2000 taxons), des vertébrés (raies, requins, poissons), mais aussi des échinodermes, des éponges, des coraux, des céphalopodes….. Témoins d’écosystèmes foisonnants. Par leur richesse, les écosystèmes littoraux lutétiens sont aujourd’hui considérés comme les plus riches de tout le Tertiaire.
Quelques gastéropodes du Lutétien moyen de Fleury-la-Rivière
Comme nous venons de le voir, le Lutétien moyen se caractérise par de fréquents changements du milieu marin : variations eustatiques, hydrodynamisme... Le climat en revanche semble avoir conservé un caractère subtropical relativement constant permettant une biodiversité importante pendant cette période : on recense en particulier une importante malacofaune très diversifiée et parfois de grande taille partageant des affinités avec les faunes marines de l’actuelle mer Méditerranée et de l’indo-pacifique. Les 6 unités sédimentaires présentes dans le sous-sol de Fleury-la-Rivière recèlent une biodiversité exceptionnelle de mollusques plus riches en individus qu’en espèces. Il s’agit vraisemblablement de concentrations formées par les courants marins. Si l'on en croit les dernières études scientifiques, celles-ci se seraient mises en place progressivement pendant un laps de temps relativement important, (Huyghe suppose une forte compaction de ces niveaux). Ces dépôts de tempêtes sont particulièrrement observables au sein des unités 3 et 4 où les coquilles de mollusques se retrouvent couchées et bien alignées au sein des différents bancs, laissant supposer la présence de forts courants marins unidirectionnels.
Retrouvez un album photos de ce musée en page 4 de cet article :
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Reconstiturion d'un Campanile giganteum
Les coquilles de Campaniles giganteum par exemple (fossiles emblématiques de ces unités) sont généralement découverts couchés à l’horizontal, l’apex orienté vers l’est. Pour la plupart, ces coquilles ont été charriées par des courants de tempêtes, puis enfouies plus ou moins profond par le déplacement de bancs de sables consécutifs à de forts courants sur le fond marin. Précisons en outre qu’un certain nombre de coquilles présente des usures prononcées, voire des cassures et des trous. Il est intéressant de noter que dans la majeure partie des cas, les coquilles endommagées ne présentent pas de cassures fraiches. Huyghe (2010) suppose que celles-ci ont subi de forts transports (effets du roulis des vagues et des courants marins littoraux) sur un fond bénéficiant de faibles apports sédimentaires, rendant l’enfouissement des organismes difficile. La plupart des restes fossiles contenus dans ces unités a donc été enfouie en dehors de leur biotope originel.
Vitrines d'expositions permettant de voir les différentes espèces de mollusques recensées dans le sous-sol de Fleury-la-Rivière.
De plus, l’encroutement important de certains Campaniles, colonisés par différents organismes nectobenthiques (éponges, coraux…), laisse supposer une longue période d’affleurement de ces coquilles sur le fond marin. Ajoutons enfin la présence au sein de ces dépôts, d’un certain nombre de restes fossiles étrangers au domaine littoral : c’est le cas des coquilles de nautiles ou des nombreux restes de vertébrés marins, habituellement localisés dans la zone bathyale. Ces restes fossiles semblent appuyer l’existence d’un hydrodynamisme important durant cette période.
Campanile giganteum (Coll. P.Legrand)
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Néanmoins, la plupart des fossiles retrouvés dans le Lutétien moyen sont généralement très bien conservés. Le nombre de coquilles roulées ou cassées reste faible proportionnellement au nombre d’individus que renferment ces couches. La conservation est même dans certains cas très remarquable : de nombreuses coquilles semblent avoir conservé leurs ornementations originelles. Cette exceptionnelle conservation peut s’expliquer par la très faible diagenèse que ces dépôts ont subi depuis l’Ère Tertiaire, ceux-ci ayant été faiblement enfouis.
Retrouvez ci-dessous une liste exhaustive des coquilles fossiles recensées dans le Lutétien moyen de Damery.
(Cliquez sur une image pour l'agrandir)
Pour aller plus loin.
Retrouvez ci-après le blog de la "cave aux coquillages" : Cliquez ici
Retrouver ci-après la thèse de doctorat de Damien Huyghe (2010) : Cliquez ici
Retrouvez ci-après, un article intitulé "La Lutétien de Fleury-le-Rivière et ses campaniles" : Cliquez ici
Retrouvez ci-après, un reportage télévisé réalisé par France 3 sur la "cave aux coquillages" :
Retrouvez ci-après, un reportage télévisé réalisé par France 3 et le BRGM portant sur la "cave aux coquillages" :
Retrouvez ci-après un reportage sur le Lutétien de l'Oise, réalisé par la SAGA : Cliquez ici
Retrouvez ci-après un article "pdf" intitulé "Le Lutétien, une période charnière de l'histoire du Bassin parisien" : Cliquez ici
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